Édition du vendredi 16 février 2018
Le rapport Spinetta préconise la fermeture des « petites lignes » ferroviaires
Jean-Cyril Spinetta a remis hier au Premier ministre son rapport sur « l’avenir du transport ferroviaire ». Ce rapport doit servir de base de réflexion pour un projet de loi que le gouvernement va présenter avant l’été. Il passe en revue tous les aspects de la question, depuis les dessertes jusqu’à l’organisation de la SNCF, l’ouverture à la concurrence et le statut de cheminot.
Pour les élus, les questions les plus cruciales sont celles de la desserte, des petites lignes et de la gouvernance territoriale du transport ferroviaire.
En matière de desserte, l’un des aspects les plus explosifs du rapport est la proposition claire et nette de fermeture des lignes jugées « non pertinentes ». Le rapport, reprenant des données connues, rappelle que 1,7 milliard d’euros sont consacrés à des lignes transportant « moins de 2 % des voyageurs ». Ces lignes peu fréquentées – c’est-à-dire ayant peu de voyageurs – et peu « circulées », comme dit le jargon ferroviaire, c’est-à-dire ayant peu de trains par jour – sont considérées par Jean-Cyril Spinetta comme une aberration économique et même écologique, puisque la plupart d’entre elles ne sont pas électrifiées et que les trains diesel polluent davantage que les cars les plus récents. Il préconise donc, d’une part, que l’État n’y investisse plus un centime, et que d’autre part, elles soient fermées, à moins que les régions souhaitent les reprendre – ce qu’elles feraient alors, suggère-t-il, sans subvention.
Le rapport ouvre donc une fois encore le débat de la « pertinence économique » d’infrastructures coûteuses qui ne concernent qu’un faible pourcentage d’usagers. Ce débat existe dans bien des domaines : téléphonie mobile, réseaux d’eau et d’électricité, etc. Il est évident que développer des infrastructures coûteuses pour un petit nombre d’usagers n’est pas rentable économiquement… mais beaucoup rétorqueront que ce n’est pas une question de rentabilité mais de service public. Le débat se focalisera évidemment sur cette question dans les mois à venir.
Il est à noter que Jean-Cyril Spinetta ne traite pas seulement de la pertinence des « petites lignes » mais aussi de celles de certaines lignes TGV. Un chapitre intéressant de son rapport bat en brèche, données à l’appui, « l’idée reçue » selon laquelle l’avion serait par essence plus coûteux que le train. Si l’on raisonne en coût global, c’est-à-dire en intégrant le coût d’investissement des infrastructures, ce n’est pas toujours vrai. Pour les liaisons de plus de 700 km, explique l’auteur du rapport, l’avion devient moins cher que le train, toutes dépenses confondues – non pas pour l’usager, on ne parle pas ici du prix des billets, mais pour la collectivité. Il recommande donc de consacrer davantage d’argent au renforcement des lignes TGV « très pertinentes » et sur-saturées, comme les liaisons Paris-sud est de la France, et de laisser les liaisons de plus de 700 km à l’avion.
Augmenter les redevances TER
Sur le terrain de la gouvernance, Jean-Cyril Spinetta propose que les régions, qui exploitent les lignes TER, payent, comme cela se fait déjà en Île-de-France, « le coût complet du réseau sur lequel ils circulent », dont une partie est prise en charge aujourd’hui par l’État. En d’autres termes, il préconise une augmentation de la redevance payée par les régions pour le TER. L’astuce de cette proposition – ou le vice, selon le point de vue – est qu’elle est faite pour inciter les régions… à fermer les petites lignes : « Si le coût complet était couvert par les redevances, explique le rapporteur, chaque fermeture de ligne réduirait d’autant le montant des redevances payées. »
Enfin, le rapport reprend en grande partie les mesures listées dans la proposition de loi Nègre-Maurey, parue l’an dernier (lire Maire info des 27 juin et 7 septembre 2017), en matière de préparation à l’ouverture à la concurrence. Comme les deux sénateurs, il préconise notamment que l’ouverture à la concurrence des transports régionaux se fasse « progressivement » à partir de 2019 et que le matériel roulant - comme les ateliers de maintenance - soit mis à la disposition de plein droit des autorités organisatrices, les régions, « à valeur nette comptable ».
Depuis hier, les réactions se multiplient sur les conclusions de ce rapport. Côté gouvernement, son appui aux propositions de Jean-Cyril Spinetta fait peu de doutes. Matignon, dans un communiqué, estime le rapport « complet et lucide » tandis que le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, déclarait ce matin sur Cnews à propos de la SNCF : « Ça ne peut pas continuer comme ça, on va droit dans le mur. »
L’association Régions de France est évidemment beaucoup moins enthousiaste : elle se dit « très préoccupée » par les propositions concernant les transports de proximité et dénonce « une méconnaissance de la réalité du transport ferroviaire dans les territoires ».
Télécharger le rapport.
Pour les élus, les questions les plus cruciales sont celles de la desserte, des petites lignes et de la gouvernance territoriale du transport ferroviaire.
En matière de desserte, l’un des aspects les plus explosifs du rapport est la proposition claire et nette de fermeture des lignes jugées « non pertinentes ». Le rapport, reprenant des données connues, rappelle que 1,7 milliard d’euros sont consacrés à des lignes transportant « moins de 2 % des voyageurs ». Ces lignes peu fréquentées – c’est-à-dire ayant peu de voyageurs – et peu « circulées », comme dit le jargon ferroviaire, c’est-à-dire ayant peu de trains par jour – sont considérées par Jean-Cyril Spinetta comme une aberration économique et même écologique, puisque la plupart d’entre elles ne sont pas électrifiées et que les trains diesel polluent davantage que les cars les plus récents. Il préconise donc, d’une part, que l’État n’y investisse plus un centime, et que d’autre part, elles soient fermées, à moins que les régions souhaitent les reprendre – ce qu’elles feraient alors, suggère-t-il, sans subvention.
Le rapport ouvre donc une fois encore le débat de la « pertinence économique » d’infrastructures coûteuses qui ne concernent qu’un faible pourcentage d’usagers. Ce débat existe dans bien des domaines : téléphonie mobile, réseaux d’eau et d’électricité, etc. Il est évident que développer des infrastructures coûteuses pour un petit nombre d’usagers n’est pas rentable économiquement… mais beaucoup rétorqueront que ce n’est pas une question de rentabilité mais de service public. Le débat se focalisera évidemment sur cette question dans les mois à venir.
Il est à noter que Jean-Cyril Spinetta ne traite pas seulement de la pertinence des « petites lignes » mais aussi de celles de certaines lignes TGV. Un chapitre intéressant de son rapport bat en brèche, données à l’appui, « l’idée reçue » selon laquelle l’avion serait par essence plus coûteux que le train. Si l’on raisonne en coût global, c’est-à-dire en intégrant le coût d’investissement des infrastructures, ce n’est pas toujours vrai. Pour les liaisons de plus de 700 km, explique l’auteur du rapport, l’avion devient moins cher que le train, toutes dépenses confondues – non pas pour l’usager, on ne parle pas ici du prix des billets, mais pour la collectivité. Il recommande donc de consacrer davantage d’argent au renforcement des lignes TGV « très pertinentes » et sur-saturées, comme les liaisons Paris-sud est de la France, et de laisser les liaisons de plus de 700 km à l’avion.
Augmenter les redevances TER
Sur le terrain de la gouvernance, Jean-Cyril Spinetta propose que les régions, qui exploitent les lignes TER, payent, comme cela se fait déjà en Île-de-France, « le coût complet du réseau sur lequel ils circulent », dont une partie est prise en charge aujourd’hui par l’État. En d’autres termes, il préconise une augmentation de la redevance payée par les régions pour le TER. L’astuce de cette proposition – ou le vice, selon le point de vue – est qu’elle est faite pour inciter les régions… à fermer les petites lignes : « Si le coût complet était couvert par les redevances, explique le rapporteur, chaque fermeture de ligne réduirait d’autant le montant des redevances payées. »
Enfin, le rapport reprend en grande partie les mesures listées dans la proposition de loi Nègre-Maurey, parue l’an dernier (lire Maire info des 27 juin et 7 septembre 2017), en matière de préparation à l’ouverture à la concurrence. Comme les deux sénateurs, il préconise notamment que l’ouverture à la concurrence des transports régionaux se fasse « progressivement » à partir de 2019 et que le matériel roulant - comme les ateliers de maintenance - soit mis à la disposition de plein droit des autorités organisatrices, les régions, « à valeur nette comptable ».
Depuis hier, les réactions se multiplient sur les conclusions de ce rapport. Côté gouvernement, son appui aux propositions de Jean-Cyril Spinetta fait peu de doutes. Matignon, dans un communiqué, estime le rapport « complet et lucide » tandis que le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, déclarait ce matin sur Cnews à propos de la SNCF : « Ça ne peut pas continuer comme ça, on va droit dans le mur. »
L’association Régions de France est évidemment beaucoup moins enthousiaste : elle se dit « très préoccupée » par les propositions concernant les transports de proximité et dénonce « une méconnaissance de la réalité du transport ferroviaire dans les territoires ».
Franck Lemarc
Télécharger le rapport.
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